Il s’agit de Daniel Mermet, Daniel Schneidermann, Frédéric Taddéi, Stéphane Guillon, Didier Porte, Hervé Kempf, Natacha Polony, Olivia Recasens, Romaric Godin, Richard Labévière, Raphaël Glucksmann, …
Sur l’indépendance des médias, je vous recommande cet excellent – et long – article sur Bastamag : Le pouvoir d’influence délirant des dix milliardaires qui possèdent la presse française (
Censure ou incompétence ?
Pour chacun des cas, je vous laisse estimer la véritable raison de ces « éloignements ». Vous pouvez bien sûr la justifier en commentaires.
En 2018, Reporters Sans Frontières a classé la France au 33e rang du point de vue de la liberté de la presse, entre la Slovénie et la République Tchèque. À l’exception de l’Espagne (31e), tous les pays de l’Europe occidentale et nordique sont classés dans les 17 premières places.
La liste des « écartés » par ordre (plus ou moins) chronologique :
- Daniel Mermet, journaliste.
Il crée et anime la (trop « gauchiste » ? ) émission Là-bas si j’y suis sur France-Inter durant 25 ans (1989–2014). Après un déplacement à un créneau moins porteur (17h -> 15h) en 2006 , il est finalement licencié et l’émission supprimée.
Jugements judiciaires : en novembre 2017, Radio France est condamnée en appel pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse.
Retrouvez-le là : Là-bas si j’y suis - Daniel Schneidermann, journaliste. Il quittera France 5 suite à la suppression de l’émission Arrêt sur images qu’il animait depuis 12 ans (1995–2012). Il fût licencié du Monde en 2003.
Il a longtemps écrit des chroniques hebdomadaires consacrées à l’analyse des images télévisuelles, d’abord dans Le Monde puis dans Libération. Il fût licencié du Monde (2003), un passage de son livre étant jugé « attentatoire à l’entreprise pour laquelle il travaille ». Jugements judiciaires : les prud’hommes de Paris lui donneront gain de cause en 2005, jugement confirmé en appel en 2007.
Retrouvez-le dans sa version web d’Arrêt sur Images ; - Frédéric Taddéi : son émission Ce Soir (ou Jamais !) (2006–2016) après avoir vu sa fréquence réduite, est supprimée. En juillet 2018, il est définitivement écarté du service public. Depuis il anime son émission Interdit d’interdire sur RT France ;
- Stéphane Guillon, chroniqueur humoriste à la Matinale de France-Inter. Il sera licencié en juin 2010. Quelques semaines avant il s’était moqué d’Eric Besson, alors ministre de l’immigration de N. Sarkozy.
Le 22 mars 2010, dans sa chronique, il assimile Éric Besson à un suppôt du nazisme œuvrant, « en taupe », à l’instauration d’une France « pure et blanche » avec « Marine Le Pen comme présidente »
Jugements judiciaires (Prud’hommes et Cour d’appel) : le , France Inter est condamné par le conseil de prud’hommes de Paris à lui verser 212.011,55 € de dommages et intérêts pour licenciement abusif. La cour d’appel de Paris confirme cette décision , ajoutant à la décision précédente 23.000 euros au titre du préjudice moral (2013). - Didier Porte, chroniqueur humoriste. En 2010, quelques jours après le licenciement de Stéphane Guillon (cf. supra), il est licencié de La Matinale et du Fou du Roi, émissions diffusées sur France Inter.
Jugements judiciaires : la justice condamne la station de radio à lui verser 250.000 euros pour licenciement abusif (2012).
Retrouvez-le chez Mediapart ; - Hervé Kempf, ancien journaliste de Courrier international, de La Recherche et du Monde 1, actuel rédacteur en chef de Reporterre.
En août 2013, il justifie son départ du quotidien Le Monde par le refus répété de la direction du journal de le laisser réaliser des reportages sur le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes;
Retrouvez le chez Reporterre ; - Aude Ancelin, directrice adjointe de la rédaction de Marianne de 2011 à 2014, puis de la rédaction de L’Obs de 2014 à 2016 dont elle sera licenciée.
Au sujet de L’Obs : propriété à 66 % des actionnaires du Groupe Le Monde, Xavier Niel (Free) et Matthieu Pigasse (banque Lazard)
Jugements judiciaires : Le conseil des prud’hommes condamnera l’hebdomadaire à lui verser 90.000 euros d’indemnités pour licenciement « sans cause réelle et sérieuse » ;
Retrouvez-la : chroniqueuse au 1 hebdo, animatrice sur le site Là-bas si j’y suis. Elle devient directrice du Média où elle anime l’émission Entretien libre ; - Natacha Polony, journaliste
En 2017, Paris Première (famille Mohn) lui signifie l’arrêt de son émission Polonium, et Europe 1 (Lagardère SCA) celui de sa revue de presse dans la matinale, ainsi que sa participation à deux autres émissions, Médiapolis, et Le débat d’Europe Soir.
Jugements judiciaires : le conseil des prud’hommes saisi par Natacha Polony pour « licenciement sans cause réelle sérieuse »., n’a pas tranché (2018) et renvoie l’affaire devant le juge départiteur.
Retrouvez là dans Polony TV ;
- Olivia Recasens, directrice adjointe de la rédaction du Point depuis 2006. Licenciée en 2017 parce que son compagnon journaliste au Canard enchainé enquête sur Bolloré ? Peut-être, peut-être pas ! En savoir plus : Olivia Recasens, le Point final ? ;
- Romaric Godin : suppression de son poste de rédacteur en chef adjoint à « La Tribune » (2017) ;
- Richard Labévière : licencié du magazine Causeur (2008) ;
- André Glucksmann, essayiste.
De décembre 2017 à août 2018, il est directeur de rédaction du Nouveau Magazine littéraire qu’il quitte pour raison de dissonances internes au sujet du traitement réservé au président de la République E. Macron que l’actionnaire majoritaire (C. Perdriel) juge trop critique [Les raisons d’un départ, NML, 2018] ; - . . .
- On peut aussi citer les Guignols de l’info, Le Petit Journal de Yann Barthès, le légendaire « Zapping », les JT et surtout Spécial Investigation, autant d’émissions supprimées de Canal+ à l’arrivée du multimilliardaire Vincent Bolloré en 2015 ;
Les propriétaires de quelques organes de l’audiovisuel privés (entre parenthèses : principale activité et rang au classement des fortunes françaises)
. TF1, LCI, TMC, … : groupe Bouygues (BTP, 30e)
. BFM Business : Alain Weill et Drahi (téléphonie, 9e)
. Le Monde, L’Obs, Télérama, Courier International : Pierre Bergé (luxe, 363e), Matthieu Pigasse (finance) et Xavier Niel (téléphonie, 11e)
. Libération, l’Express, L’expansion, RMC, … : Patrick Drahi (téléphonie, 9e), E. De Rothschild (banque)
. Le Figaro : Serge Dassault (armement, 5e)
. Europe 1, le JDD et Paris Match : Lagardère (communication, 305e)
. Les échos, Le Parisien, … : Bernard Arnault (Luxe, 2e)
. Le Point : Pinault (Luxe, 7e)
. Canal+, C8, CNews : Bolloré (logistique & transport, 10e)

L’article ici donne l’infographie du « qui possède quoi « .
Pour aller plus loin :
Liberté d’information
Collectif Informer n’est pas un délit ;
Milliardaires et liberté d’informations
Acrimed, « Les grandes manœuvres de concentration multimédia : comment et pourquoi ? », 2016
Acrimed, « Concentration des médias : convergences et dépendances », 2016
Le Monde diplomatique, « Médias français : qui possède quoi », 2018
Laurent Mauduit, « Main basse sur l’information ! », Médiapart, 2015
Laurent Mauduit, Main basse sur l’information, Éditions Don Quichotte, 2016
Aude Lancelin, Le monde libre, Editions Les liens qui libèrent, 2016Liste citée en fin de l’article Le pouvoir d’influence délirant des dix milliardaires qui possèdent la presse française, Bastamag, 2017.